On aperçoit ses messages sur les écrans, légers, intelligents, sensibles ; on les apprécie au point de s’approcher, on voit son nom, elle s’appelle Cécile Fraeye, et l’on découvre les compliments émus de ceux et celles qu’elle a massés/soignés. Dans une soudaine intuition, on décide de s’offrir enfin un cadeau d’anniversaire dont on se souviendra : un massage chez Cécile, au Serpent de Jeanne. On monte jusqu’à sa maison perchée sur une colline périgourdine. Sourires des yeux et des lèvres, joie pétillante au RV. Xinhui mon épouse, médecin chinoise habituée aux massages et pratiquant en permanence les auto-massages et la médecine traditionnelle de son pays, passe en premier, quelque peu dans l’expectative : après deux heures de soins, elle ressort impressionnée par le savoir de Cécile en termes de médecine traditionnelle chinoise, par la précision du diagnostic opéré du bout des doigts, par l’intention aimante derrière chaque geste, par la douceur et la fermeté des soins et surtout leur effet : son anxiété des dernières semaines a subitement disparu… Elle est emballée. Et je vois bien que son beau visage est totalement détendu – «Comme je ne l’ai jamais vue » me dis-je – A mon tour, je passe à la casserole de Jouvence : les mains se posent très rapidement sur des points précis, comme s’ils savaient déjà où aller, ils les pressent en tournant. Cécile se concentre en silence, les yeux quasi clos, cherche du bout des doigts, ressent ce que je ressens, et trouve… Sorte d’Amélie Poulain dégottant des secret cachés depuis des décennies : elle commence à décrire doucement une par une mes tensions, me questionne puis m’écoute d’un air à la fois sérieux et absent – elle regarde en elle, je crois – elle décrit et analyse avec une sensibilité et une intelligence extrême toutes les traces des traumas, ceux enfouis sciemment et ceux que je croyais oubliés… Elle rebondit sur mes réponses, détend l’ambiance par de légers traits d’humour – on dirait qu’elle a seize ans – puis relie les choses entre elles, dénoue toute l’histoire jusqu’à me la rendre subitement limpide ; on dirait qu’elle a cent ans… Elle revient encore et encore sur les points de tension et les détend patiemment en guettant mes réactions et les siennes. On a l’impression de faire le travail à deux, l’interaction est constante : son corps réagit tout comme le timbre de sa voix, tout comme mon corps et ma voix. « Il ne faudrait pas laisser ça comme ça» dit-elle gravement… Enfin, elle donne quelques recettes pour résoudre : « On pourrait faire ça .. ou plutôt ça.. Ou ça, oui, ça c’est bien !», avec légèreté et humour, comme un enfant dirait: « On ferait comme si c’était de vrai »… Elle mélange à plaisir le rationnel et l’irrationnel. Je ressors ne sentant plus aucune tension durant les heures de voiture qui suivent, ni dans mon corps ni dans ma tête. Nuit réparatrice sans rêve aucun, tout comme il faut, dirait Krishnamurti. Ensuite, je me repasse le film, analyse tout ce qu’elle a fait émerger, j’en reste encore coi. Je me dis que cette Cécile est en réalité une gentille sorcière sans âge qui a décidé délibérément d’aimer les gens et les aime si fort que tout le monde l’aime.. Elle aide si bien, même ceux qui comme moi croyaient n’avoir besoin d’aucune aide, qu’on a envie de l’aider à aider. Un manière de faire le bien par personne interposée. D’où mon message..